Un texte de Danielle Landry
Voilà, les Québécoises et les Québécois vont pouvoir renouer avec les festivals et les grands événements extérieurs. Malgré les restrictions et les mesures de prévention de la COVID-19, ces extraordinaires fervents de rassemblements en plein air devraient être au rendez-vous.
Un fait demeure, les Québécois sont plus conscients que jamais de leur responsabilité collective envers la protection de l’environnement. Par conséquent, ils continueront d’exiger que les organisateurs d’événements troquent des façons de faire dont le coût environnemental est devenu trop lourd pour des solutions plus durables. Même les festivaliers les plus incrédules pourraient se laisser convaincre de renoncer à certaines habitudes plus ou moins écoresponsables. Une fois le changement opéré, ils en demanderont tout autant des organisateurs d’événements.
Parmi les organisateurs, il s’en trouve comme ceux de l’Ultra-Trail Harricana du Canada ou du Concours des châteaux de sable des Îles qui ont détecté la tendance bien avant les autres. Ils ont su insuffler une bonne dose de leur conviction environnementale dans une planification événementielle axée sur la durabilité.
Du côté de Triathlon Québec, on a visé un cran plus haut en faisant évoluer la norme dans l’industrie et en façonnant un comportement écoresponsable dans la communauté. Le programme de certification des événements ÉcoTQ a été conçu en partenariat avec le Conseil québécois des événements écoresponsables. En 2020, pas moins de vingt-et-un événements se sont engagés à mettre en place des mesures e?coresponsables permettant ainsi aux adeptes de cette pratique sportive d’opter pour des événements certifiés écoresponsables.
La capacité de support des milieux naturels compromise
Si la gestion écoresponsable des événements est en progression, il est plus rare que la réduction des impacts sur les milieux naturels reçoive toute l’attention qu’elle mérite. Pour quiconque ouvre les yeux sur la pollution, la détérioration de la végétation, la compaction des sols, l’érosion ou d’autres effets cumulatifs causés par les attroupements sur certains sites, il est évident que la capacité de support des milieux naturels est trop souvent compromise. C’est pourquoi le Conseil québécois des événements écoresponsables offre la formation « Organiser un événement à faible impact écologique » en collaboration avec De ville en forêt et en partenariat avec Sans trace Canada.
L’Union internationale pour la conservation de la nature fait autorité au plan international sur l’état de la nature et des ressources naturelles dans le monde et sur les mesures pour les préserver. Dans son rapport, Mitigating biodiversity impacts of new sports venues, elle insiste pour dire que la restauration des écosystèmes et des habitats ne devrait être envisagée qu’une fois que tout a été mis en œuvre pour éviter, pour prévenir ou pour réduire les impacts écologiques sur les milieux naturels.
En protégeant mieux leur site, de nombreux festivals culturels ou d’événements sportifs dans le reste du Canada et à travers le monde ont accru leur durabilité tout en améliorant leur acceptabilité sociale. Ils ont comme stratégie commune de miser sur l’éducation ainsi que sur l’aménagement du site pour aider les publics à faire la transition vers des comportements mieux adaptés à la fragilité des milieux naturels. La renommée de ces rassemblements est grande et pour cause.
Des exemples de bonnes pratiques pour les milieux naturels
Winnipeg Folk Fest
Le Parc provincial Birds Hill au Manitoba accueille le Winnipeg Folk Fest. On y cherche à réduire l’empreinte carbone de l’auto individuelle et à limiter l’occupation du sol pour le stationnement. Une tonne d’informations est accessible en ligne pour inciter les festivaliers à se rendre à vélo ou à utiliser le service d’autobus mis gratuitement à leur service. Le trajet est d’une durée de deux heures en empruntant une voie cyclable à partir du centre-ville de Winnipeg. Une fois sur place, une navette prend le relais pour faciliter les déplacements.
Camper sur place fait également partie de l’expérience écoresponsable au Winnipeg Folk Fest et les organisateurs ont tout prévu pour la rendre attrayante. On vous offre donc le choix de camper dans la quiétude sous les arbres, ou encore sur un autre site que 6 000 campeurs transforment chaque année en un espace de création culturelle, d’expression artistique et de vie communautaire.
Bass Coast Festival
Le Bass Coast Festival est organisé sur le territoire traditionnel des N?e?kepmx et Syilx en Colombie-Britannique. Toute une stratégie multimédia est mise en ligne pour expliquer aux festivaliers comment appliquer la politique de gestion des ressources naturelles et des matières résiduelles à travers des gestes simples. On va même jusqu’à leur recommander de ne pas apporter des éléments décoratifs ou du maquillage brillant qui seraient toxiques pour l’environnement. On enseigne aux participants à effectuer un balayage visuel du terrain en rangs serrés, puis à retirer jusqu’aux plus petits des détritus qui risqueraient de nuire aux mammifères et à la vie aquatique.
Glastonbury Festival
Tous les 5 ans, le Glastonbury Festival of Contemporary Performing Arts met en jachère son terrain situé sur une ferme dans une zone rurale de l’Angleterre. Cette année-là, le festival fait relâche. Les années de festival, des toilettes à compost sont installées sur le site. Les festivaliers sont fortement encouragés à les utiliser. Les excréments humains transformés en compost servent à enrichir les terres qui sont vouées à la permaculture.
Michael Eavis a fondé le Glastonbury Festival en 1970 sur la terre que sa famille cultive depuis plusieurs générations. Chaque année, une campagne intitulée Love Worthy Farm – Leave No trace attire l’attention des festivaliers sur les comportements à adopter afin de réduire les impacts de leurs célébrations estivales. Ils signent le Serment vert (Green Pledge) en achetant leur billet d’entrée.
La durabilité des grands rassemblements passe nécessairement par la protection et la conservation de leurs milieux naturels. Les publics et les organisateurs des événements et des festivals en plein air partagent le même amour de la nature, de sa beauté et de ses bienfaits. En oeuvrant de concert, ils parviendront à mieux faire coexister les besoins des humains et ceux des écosystèmes et des habitats sur les mêmes territoires. Tel que le dit Michael Eavis, « Le festival est une célébration de vie et de joie, mais nous ne devons pas perdre de vue ce que nous entreprenons pour parvenir au meilleur équilibre possible entre la nature et les ressources naturelles. »
Danielle Landry a fondé et dirige De ville en forêt. Elle est la responsable de la formation « Organiser un événement à faible impact écologique » offerte par le Conseil québécois des événements écoresponsables, en partenariat avec Sans trace Canada. Cette formation s’adresse aux organisatrices et aux organisateurs d’événements se déroulant en plein air, aux chargé.e.s de projet et aux responsables des communications. Elle vise à les sensibiliser à l’analyse des risques d’impact et des impacts cumulatifs sur le milieu naturel ainsi qu’à les outiller en vue d’intégrer une approche d’éducation des publics à la fréquentation responsable du site à toutes les étapes de la planification de l’événement.